Ce mardi toute la journée, les partisans de la nouvelle junte au
pouvoir au Burkina Faso se sont rassemblés à Ouagadougou sur la place de la
Nation, à l’appel notamment du mouvement « Sauvons le Burkina » pour célébrer
le coup d'État.
La place de la Nation était ce
mardi le point de ralliement de tous ceux qui reprochaient quelque chose à
l’ancien pouvoir incarné par l’ex-président, Roch Marc Christian Kaboré.
Plusieurs responsables d’associations sont montés sur le podium pour haranguer
la foule présente.
En milieu d’après-midi, le
mouvement « Sauvons le Burkina », organisateur du rassemblement et soutien des
pustchistes, était en conférence de presse. Sa coordinatrice Anaïs Drabo se
refuse de parler de coup d’État.
« On a tout braqué, on nous a
suivis. Vous voulez qu'on fasse comment ? On va lutter pour nos enfants,
affirme-t-elle. Ce qu'on ne nous dit pas, c'est quand les terroristes viennent,
on décapite et on démembre les gens. Ça, la population ne le sait pas. Oui, je
vous le dis, je suis dans la joie parce que je ne pense pas que ce qui s'est
passé est un coup d'État. Je parle d'une libération. »
Le mouvement a réaffirmé qu’il n’hésitera
pas à retourner dans les rues, explique son porte-parole, Valentin Yamkoudougou
: « S'il y a des manquements, nous allons attirer leur attention. Si ces
manquements perdurent, nous serons encore dans les rues. »
L’ambiance de fête a duré toute
la journée. En début de soirée, la population est rentrée dans le calme, pas un
seul militaire dans la rue tandis que la junte annonçait la réouverture des
frontières aériennes. Les véhicules humanitaires, les véhicules et camions
transportant des denrées de première nécessité, ceux transportant les produits
et équipements destinés aux forces armées ne sont pas concernés par la
fermeture des frontières terrestres, a précisé le Mouvement patriotique pour la
sauvegarde et la restauration qui régente depuis lundi 24 janvier le pouvoir au
Burkina Faso.
Les organisations de la société
civile attendent les annonces
La société civile, habituellement
très active, reste pour le moment dans l’attente des premières annonces des
putschistes. Militants des droits de l’homme et des mouvements citoyens
s’accordent pour expliquer qu’ils sont en phase « d’observation, d’écoute ». «
Nous sommes légalistes mais il faut tenir compte de l’opinion », explique l’un
des responsables de ces organisations, « la population n’est pas sortie pour
dénoncer le putsch, il y a un désir de changer de visage ». « Nous attendons de
voir les propositions des putschistes, on évite de les contacter directement »,
complète un autre activiste.
Le président du parti
d'opposition Le Faso Autrement, Ablassé Ouedraogo, estime que le pays se
trouvait dans une situation délicate, notamment sur le plan sécuritaire, tout
en condamnant une prise de pouvoir par la force.
L'attentisme de la société civile
s’explique aussi par le fait que nombre de ces leaders, en majorité sankariste,
estiment avoir été dénigrés, combattus par le régime de Roch Marc Christian
Kaboré. D’où cette volonté de repartir sur de nouvelles bases avec sans doute
une nouvelle coalition d’organisations militantes.
Si les rapports conflictuels
entre l’armée et l’ex-président sont pointés du doigt pour expliquer la chute
de ce dernier, la société civile estime que les acquis de l’insurrection n’ont
pas été appliqués. « Sankara, Zongo, il y a eu des progrès au niveau de la
justice », concède un défenseur des droits, « mais rien pour laisser la place à
une nouvelle génération d’acteurs politiques, rien pour assainir la société »,
souligne-t-il. Tous ces leaders, qui souhaitent rester anonymes, rappellent que
la vigilance est de mise, que la priorité, c’est un « retour à l’ordre
constitutionnel », que l’ambition « c’est d’en finir avec les démons du passé
», et de tout faire, explique un militant, « pour éviter un grand retour dans
le passé ».