Le 22 mars 2022, pendant que le décret portant nomination des membres du Conseil National de Transition (CNT) passait à la Télévision nationale, ces derniers, réunis tous au Palais Mohamed VI, prêtaient serment, chacun, sur le livre de sa croyance d’agir dans l’intérêt exclusif de la Guinée. Et au même moment, chaque membre conseiller national signait un engagement sur l’honneur de respecter la Charte de la Transition, avant de recevoir des mains du Président de la Transition, un exemplaire de ce texte fondamental qui fait office de constitution en cette période transitoire.
Prêter serment et s’engager sur l’honneur à servir l’intérêt
du pays sont des actes d’une grande portée pour celui qui en a conscience. Et
la remise à chaque membre du CNT d’une copie de la Charte de la Transition
signifiait que ce texte devrait lui servir de bréviaire et de boussole pendant
la durée de la Transition et jusqu’à l’adoption par voie référendaire d’une loi
fondamentale qui marquera le début d’un retour à l’ordre constitutionnel.
La Charte de le Transition n’est pas la volonté des Forces
Vives de la Nation mais celle du Président du CNRD qui l’a, dans un certain
sens, octroyée aux guinéens. Elle n’est pas le résultat d’une concertation
entre les différentes composantes de la Nation, même si l’on soutient dans
certains discours officiels qu’elle est la synthèse des recommandations issues
des concertations nationales organisées après le 5 septembre.
Cette Charte a prévu des organes auxquels des missions
claires et précises ont été assignées. Au nombre de ces organes figure le CNT.
Cet organe est l’assemblée législative de la transition. Ses missions sont
limitativement énumérées par la Charte notamment l’élaboration d’un projet de
constitution qui sera soumis aux guinéens pour adoption par référendum et
l’élaboration de textes législatifs.
La détermination de la durée de la transition ne figure
nullement parmi ces missions. Aux termes de l’article 77 de la Charte, la durée
de la transition sera définie d’un commun accord par le CNRD et les Forces
Vives de la Nation. Cette disposition est sans équivoque. Et s’il y a le
moindre doute sur le sens qu’il faut lui donner, la Cour suprême peut être
saisie afin qu’elle l’interprète.
Ainsi, toute délibération du CNT relative à la durée de la transition
serait en contradiction avec la Charte de la Transition et une violation de
serment ainsi qu’un manquement à l’engagement solennel sur l’honneur de
respecter la Charte.
L’article 77 doit être respecté dans sa lettre et dans son
esprit. Pour cela, un cadre de dialogue doit impérativement être mis en place
afin d’engager un débat franc et sincère sur cette incontournable question. Si
les Forces Vives de la Nation et le CNRD parviennent à fixer une durée
consensuelle pour la transition, c’est la Guinée qui gagnerait et l’on aurait
une transition apaisée et inclusive.
Le dialogue et l’inclusion constituent d’ailleurs deux des
valeurs et principes consacrés par la Charte de la Transition et qui doivent
guider la transition, les organes de la transition ainsi que les personnalités
appelées à la conduire.
Aucun organe de la transition ne doit jouer un rôle que la
Charte de la Transition ne lui pas attribué.
Me Mohamed Traoré, Conseiller
national du CNT, Ancien Bâtonnier