La Guinée est le pays d’Afrique de l’Ouest qui compte le plus de
chimpanzés sauvages. Ils sont particulièrement nombreux dans la région
montagneuse du Fouta-Djalon. Mais la cohabitation est devenue difficile ces
dernières années avec la population locale. À Mamou, les médias guinéens ont rapporté
récemment plusieurs cas d’« agressions » perpétrées par des chimpanzés.
Au mois de décembre, un site de
presse en ligne titre : « Des chimpanzés protégés sèment la terreur près de
Mamou. »
« Voici l'enfant qui a été
blessé, comme vous le voyez. Ses parents l'ont pris, l'ont envoyé à l'hôpital,
et presque toutes les radios ont parlé de cette affaire », indique Lansana Kémo
Keïta. Il est le chef de l’unité régionale de la Brigade de lutte contre la
criminalité faunique et floristique de Mamou. Il nous montre la photo d’un
petit Guinéen. Sa tête est couverte de pansements, autant d’égratignures. « La
maman et l'enfant étaient dans les champs. Au moment où la maman travaillait,
l'enfant était seul. C'est à ce moment que le chimpanzé est venu prendre
l'enfant », ajoute-t-il.
Les médias, les habitants parlent
d’enlèvement. Les chimpanzés alimentent tous les fantasmes. La réalité est
moins sensationnelle. Pour Ibrahima Keita, conservateur de la nature, directeur
préfectoral de l’Environnement et de Développement durable de la préfecture de
Mamou. « Le nid écologique des chimpanzés, c'est les différentes forêts
classées. Compte tenu de l'accroissement démographique, les forêts sont
entourées par des villages. L'habitat est restreint. Forcément, il y a conflit
», démontre-t-il.
Attaquer pour survivre
En temps normal, les chimpanzés
fuient les hommes. À Mamou, ils sont acculés, ils n’ont plus cette possibilité
et choisissent l’attaque pour assurer leur survie. La pression humaine est
devenue trop forte comme à 10 kilomètres au nord de la ville. « Ça, c'est la
forêt de Kunu. Maintenant, regardez, la population est toute proche de la forêt
», montre le caporal-chef Yakwé Guilavogui, qui nous emmène à la rencontre des
habitants. « On a tellement de problèmes. Notre travail ici, c'est la
sensibilisation pour pouvoir faire une bonne collaboration. Sans quoi, ça ne
peut pas fonctionner », explique Yakwé Guilavogui.
Les chimpanzés se retrouvent en
concurrence avec les hommes pour l’exploitation des ressources naturelles,
explique le chef local de la jeunesse, Mamadou Madiou. « Pour aller chercher de
l'eau dans les rivières, ce sont les grandes personnes qui y vont le matin ou
vers le soir pour ne pas rencontrer les chimpanzés », indique Mamadou Madiou.
Le chimpanzé est surnommé le
jardinier de la forêt. Sa disparition pourrait provoquer un appauvrissement de
la biodiversité végétale dans le Fouta-Djalon.
Matthias R