Au Tchad, après une matinée de violences, le calme semble être revenu
dans la capitale, Ndjamena. La coordination citoyenne Wakit Tama appelait à des
marches dans tout le pays, pour protester contre les autorités de transition
instaurées après la mort d’Idriss Deby, il y a presque trois semaines, à savoir
le Conseil militaire de transition, dirigé par le général Mahamat Idriss Déby,
fils de l’ancien président, et contre le gouvernement qu’il a nommé par décret.
Les autorités ont officiellement
interdit cette manifestation. Elles ont aussi indiqué, vendredi 7 mai, qu’elles
feraient preuve de « bonne volonté » et qu’elles ne s’opposeraient
pas aux marches tant qu’elles seraient pacifiques. Ce samedi matin, les marcheurs,
ayant osé sortir, ont pourtant été violemment réprimés. En fin de matinée, la
tension semble être retombée.
Depuis la fin de la matinée, de
ce que nous avons pu voir, en circulant, la ville était calme. Les forces de
sécurité sont largement déployées dans les rues, on croise d’imposantes
patrouilles à bord de leurs véhicules. Policiers et militaires sont également
stationnés à de nombreux endroits. Il faut dire que les marcheurs qui avaient
osé sortir, ce samedi matin, ont très rapidement et très violemment été
réprimés.
Il faut dire aussi que la marche,
initialement prévue, ayant ainsi été empêchée, eh bien les manifestants
organisent des rassemblements épars, dans leurs quartiers, ce qui rend
difficile d’avoir une vision globale de manière immédiate.
Les forces de l’ordre ont tiré sur les premiers venus
Ce matin, la manifestation
organisée par Wakit Tama devait partir de l’espace Fest Africa, dans le VIe
arrondissement mais les forces de l’ordre ont tiré sur les premiers venus,
alors que la place était encore bien vide. Des tirs à balles réelles et à bout
portant, selon des participants. La coordination citoyenne donne un bilan, à la
mi-journée, d’une dizaine de blessés dont trois graves. L’un d’entre eux est
actuellement opéré à l’hôpital de référence de Njjamena. La coalition Wakit
Tama dénombre également quinze arrestations.
Sollicité par RFI, le ministère
de la Sécurité publique n’a pas encore souhaité communiquer. Un communiqué est
en cours de rédaction.
D’autres rassemblements ont été
signalés, par les cadres de Wakit Tama, dans les quartiers de Wallia, Atrone ou
encore du côté de l’Université du roi Fayçal. La police y aurait violemment
dispersé les marcheurs. Les journalistes de RFI ont également reçu des tirs de
lacrymogène dans les jambes, leur chauffeur a été frappé par les policiers. Ils
ont été brièvement interpellés par des policiers et par des militaires et leur
matériel saisi. Le matériel a été récupéré mais les enregistrements ont été
effacés.
Plusieurs arrestations à Moundou
À Moundou, la capitale de la
province du Logone occidental, on a également répondu à l'appel du mouvement
Wakit Tama. Là aussi, les manifestants se sont heurtés aux forces de sécurité
qui ont réprimé leur rassemblement et procédé à de nombreuse arrestations. Joint
par RFI, Aubin (nom d’emprunt) a participé à cette manifestation. Il nous
raconte comment cela s'est passé.
« Très tôt le matin, on
s’est réuni au rond-point avec les banderoles. Les mots qui nous tiennent
à cœur: « Non au coup d’Etat militaire du CNT » ; « Non
à la confiscation du pouvoir » ; « Non à l’ingérence
française ». Quand on a commencé à manifester, il y a des forces de
l’ordre qui ont apparu. On leur a fait comprendre que la manifestation,
aujourd’hui, était pacifique et ils nous ont compris. Ils nous ont encadrés et
la manifestation s’est déroulée dans la sérénité, et dans le calme. Arrivé à un
moment, le préfet a fait son apparition et il a ordonné aux policiers de nous
saccager, en lançant des gazes lacrymogènes. Il y treize personnes arrêtées,
deux personnes blessées. On dénonce cette attitude-là. Elle ne nous honore pas
parce que quand on n’aime pas les reproches, le pays ne peut pas se développer.
Laissez au moins les gens manifester pour dire ce qui leur tient à cœur ».
Source RFI