Pour Noël, les partisans du président gabonais semblent avoir choisi
d’offrir à leur champion un cadeau de leur cru, assurément, mais un cadeau à
tout le moins indécent: le parti au pouvoir appelle Ali Bongo Ondimba (ABM) à
se mettre en piste pour un troisième mandat! Rien que ça!
Le 12e congrès du Parti
démocratique gabonais (PDG) qui s’est achevé ce 23 décembre, alors que les
fidèles chrétiens s’apprêtaient à accueillir le «petit Jésus», après avoir
dressé le panégyrique du «candidat naturel» l’incite à prendre place dans les
starting-blocks pour la présidentielle d’août 2023. Le fils de son père ne
s’est pas prononcé sur cette supplication à candidature, entretenant le flou
sur son avenir politique. Il n’en demeure pas moins qu’il ne voit pas cette
suggestion, bien entendue montée de toute pièce comme c’est le classique en
Afrique, d’un mauvais oeil.
Petit florilège du silence
parlant de ABM qui a encore des «ambitions, de hautes ambitions» pour son pays:
«il n’y a jamais deux sans trois» ou «j’ai parfaitement entendu vos
appels, vos nombreux appels concernant l’élection présidentielle. Ces appels,
je les prends comme un témoignage de confiance, un signe, mais surtout d’amour»
ou encore «je ne vous abandonnerai jamais (…) Si le chemin parcouru est déjà
grand, la tâche à accomplir reste immense». Et encore, et surtout, comme pour
fermer le clapet à ceux qui pensent qu’après l’accident vasculaire cérébral qui
a laissé des séquelles bien visibles sur lui, Ali Bongo leur a servi un cinglant
«moi je suis en forme, en forme olympique»!
Peut-on encore douter des
intentions de celui qui se présente comme le «messie» gabonais et qui compte
aller décrocher une troisième étoile comme l’a fait Messi pour l’Argentine lors
du Mondial de football Qatar 2022? Sauf qu’ici, nous sommes loin des beaux et
futuristes stades du petit émirat riche en or noir. Ce n’est pas le quantième
du mandat qui pose problème, à la toute limite. Pour un chef de l’Etat qui
travaille, qui se soucie de son peuple, qui est aimé et accepté par ses
compatriotes, en valeur absolue, le problème de longévité au pouvoir peut ne
pas se poser.
Mais Nelson Mandela, au regard de
l’aura dont il bénéficiait, s’il avait demandé à exercer 4 ou 5 mandats à la
présidence sud-africaine, il y a fort à parier que ses compatriotes les lui
auraient accordés. Pourtant il n’en a fait qu’un! Et cela aurait pu faire
réfléchir ABM et dissuader par la même occasion tous ces dirigeants africains
qui, oubliant que les cimetières sont remplis de tombes d’hommes qui se
croyaient indispensables, s’érigent en sauveurs de leurs pays respectifs.
Que cherche-t-on à maintenir Ali
Bongo Odimba à la tête d’un Etat alors qu’il a davantage droit au repos
pour se remettre de cet AVC qu’il a vaincu mais qui a laissé des traces
importantes sur lui? Que recherchent les pontes du PDG à vouloir coûte que
coûte garder Ali Bongo au pouvoir? Pensent-ils en toute sincérité qu’il est le
seul qui mérite, après tant d’années passées à la tête du pays, de tenir le
gouvernail du bateau? Quel est le dessein caché de tous ces zélateurs qui
seront les premiers, comme les rats, à déserter le navire dès que celui-ci
commencera à prendre de l’eau?
Du reste le président gabonais
doit savoir que ceux qui l’applaudissent aujourd’hui, seront les premiers à le
vouer aux gémonies demain! Donc, même si le verrou de la limitation des mandats
a été sauté de la constitution révisée de 2017, ABM devrait éviter de tomber
sous le charme du chant des sirènes. Il le sait mieux que quiconque, à moins d’accepter
de se laisser téléguider et manipuler à la longue, qu’il risque d’aller au
mandat de trop! Il n’aura de chef que le titre et nous sommes certains que
c’est loin d’être son vœu! Pire, c’est lui, et lui seul, qui répondra des sales
besognes et forfaitures accomplies par d’autres, eux qui changeront très vite
de veste pour se la couler douce.
Il faut peut-être souhaiter que
Ali Bongo lui-même sorte de sa torpeur, et réagisse avec la vigueur et la
lucidité qui siéent en pareille circonstance. Mais sera-t-il capable de se
défaire des liens de ses «camarades»? Ça, seul l’avenir nous le dira!